Madagascar : Situation et perspectives pour la santé bucco dentaire

A Diego lorsde l'évaluation sur le sel fluoréLe Chirurgien-dentiste de France du 26 février

Le Dr Eva Ranivoharilanto, responsable du service de santé mentale et de santé bucco-dentaire au ministère de la Santé, décrit les axes de la stratégie d’amélioration de la santé buccodentaire des Malgaches. Le rapprochement avec des pays comme le Laos et le Cambodge permet de confronter les expériences et d’améliorer les pratiques. L’AOI apporte un appui dans le domaine de la formation, de la prévention et de l’accès aux soins.

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Haïti : le secteur santé et la santé dentaire

Françoise PONTICQ – Port au Prince, le 9 février 2015

 

rouch1La santé reste une priorité en Haïti, mais malgré des efforts : la  lutte contre les maladies vectorielles, contre le choléra, l`amélioration de la santé maternelle et infantile, les urgences, la route est encore longue à parcourir pour que toute la population voit ses besoins satisfaits.

LE SECTEUR SANTE

Le système public sanitaire ne répond pas à la demande : budget insuffisant, répartition géographique inégale, ruptures de stocks, personnel parfois insuffisamment formé et peu motivé, de nombreux obstacles dans l`ensemble du pays.

Après le séisme, l`afflux des ONG a permis de couvrir de nombreux besoins pendant un an et demi environ et des centres de soins étaient présents à de nombreux endroits du pays, doublés d`un personnel étranger, de gros budgets. Souvent ces structures fonctionnaient sans relations avec l`état ou trop peu pour que s`institue une passation de savoir-faire.

Peu à peu, la situation générale se normalisant, les ONG sont parties, ont réduit leur personnel et on a assisté à un manque de centres de santé répondant aux moyens économiques des gens,  à Port-au-Prince où vivent quelques 3 ou 4 millions d`habitants. Beaucoup d`ONG offrait la gratuité des soins.

Le Ministère de la Santé Publique fait des efforts, se structure et la coopération avec les organisations internationales appuie certains secteurs.

Comme toujours le secteur privé offre des soins de différentes qualité, mais le coût des soins, des examens, de l`hospitalisation et interventions chirurgicales est très élevé. D`autre part le service hospitalier public est insuffisant en quantité et en qualité.

LA SANTÉ DENTAIRE

L’accès aux soins est fortement limité par le coût des soins, la concentration des cliniques dentaires à Port-au-Prince et leur quasi absence en dehors des grandes villes de province.

De nombreuses  cliniques sont mal équipées, ne répondant pas aux normes établies en 2015.

Le service public est faible, centres d`extractions pour la plupart. Le Ministère de la Santé n`a toujours pas de représentation spécifiquement dentaire. La faculté d`état délivre environ 25 diplômes par an, ce qui est insuffisant. D`autres dentistes, formés à l`étranger (République Dominicaine, Mexique, États-Unis, Europe), pratiquent en privé, souvent sans équivalence. Le contrôle de la pratique dentaire ne peut donc être fait. De la même façon il est très difficile d`évaluer le nombre de praticiens évoluant sur le territoire.

Les « charlatans » vilipendés par les professionnels dentaires demeurent un alibi plutôt qu`une menace pour le secteur; ils existent certes mais surtout dans les zones exemptes de dentistes. Les auxiliaires dentaires, un dossier oublié ; s`il y a quelques années on en parlait comme alternative à la pénurie de dentistes en province, accompagnés d`un encadrement rigoureux, le sujet a disparu des préoccupations.

Il existe un personnel dentaire formé par des ONG- dont le SOE- et il y a eu des séminaires de recyclage jusqu`en 2008, mais depuis lors plus rien. Ce personnel travaille soit dans des cliniques privées, soit dans des centres de santé publics (rares) et ne sont pas soumis à des évaluations régulières.

L`association dentaire nationale existe toujours mais n`a aucune activité visible depuis bientôt 3 ans.

LE  SOE

La clinique du SOE offre toujours un service de soins dentaires, cela depuis les années 2000. Plusieurs chirurgiens-dentistes se sont succédés, actuellement nous sommes deux praticiens et une auxiliaire dentaire qui partageons le fauteuil du lundi au samedi midi.

La clinique a une fréquentation optimum, car les tarifs et la qualité des soins vont de pair. Même si les tarifs ont été révisés en juin 2014, ils représentent environ 1 /3 du tarif moyen ou 3 /4, selon les lieux (urbain et rural).

Nous effectuons toutes sortes de soins et de prothèses; cette dernière rubrique se limite aux prothèses en résine partielles et totales, aux stellites , aux couronnes métal, résine ou céramique. Nous envoyons la prothèse en République Dominicaine sauf pour la résine, faute d’avoir des prothésistes en Haïti. Le délai de fabrication et livraison est de 3 semaines.

Les problèmes rencontrés :

        L’usure de l’équipement qui a été acheté en 2008. Les finances du SOE ne permettront pas de le renouveler.

          Le manque de prothésiste en Haïti. Les délais sont longs et le suivi difficile.

L’activité de  2011 À 2014

2011

2012

2013

2014

Nouvelle
consultation

 

325

327

442

428

Consultation

 

1783

1646

2035

2380

Sexe

F

1213

1158

1400

1680

 

G

879

785

1080

981

Âge

0 à 6

3

2

9

7

 

7  à 12

42

50

47

44

 

13 à 25

193

97

233

489

 

26 à 45

994

1052

1146

882

 

46 et plus

862

770

874

1010

Actes

détartrage

396

451

488

476

 

extraction

196

154

144

162

 

obturation amg

90

102

76

90

 

obturation comp.

323

542

705

765

 

obturation radic.

74

62

71

31

 

radio

107

66

77

38

Prothèse

partielle

69

58

56

46

 

complete

2

1

5

 

couronne métal

3

21

 

couronne ceram

12

12

27

20

 

autre

4

12

40

35

 

Le nombre de nouvelles consultations oscille entre 20 et 22 % par an; les consultations augmentent mais ont atteint leur chiffre optimum.

Le sex ratio est autour de 1.5 au profit des filles.

Les tranches d’âge les plus représentées sont les 26-45 ans, 46 et plus, puis 13-25 ans.

Les obturations (composite et amalgame) sont les actes les plus courants, privilégiant les composites (5 à 6 fois plus que d`amalgames). Elles représentent  environ 50 % des soins, jusqu’ à 56 % en 2014.

Le détartrage, systématique chez un nouveau patient, correspond à la quantité de nouveaux patients annuels 34 % des soins. En diminution de 2011 à 2014.

Les extractions représentent 13 % des soins ;  en diminution de 2011 à 2014.

Les obturations radiculaires en moyenne 5 % des soins.

La prothèse partielle est la plus courante : 60 prothèses réalisées par an en moyenne, et 2 prothèses totales.

Les couronnes en céramique : 18 par an en moyenne.

Le service offert est réellement un service de soins, privilégiant les restaurations dentaires à l`extraction; cela varie selon les moyens du patient, mais nous encourageons à conserver les dents.

La prothèse, malgré son coût moins élevé qu`ailleurs reste une difficulté pour de nombreux patients (financière); nous n`avons pas les moyens de la subventionner.

Les recettes

Elles ont augmenté de 3 % en 2014 (par rapport à 2013), environ 28.688 US$. Les soins dentaires représentent 78 % des recettes (le reste est apporté par l’optométrie).

Les salaires représentent 56 % des dépenses, les dépenses dentaires (sans apport en matériel AOI) 9 % des dépenses, 6 % des dépenses pour l’ achat de montures et verres de lunettes. L’électricité représente 15 % des dépenses.

Cette année les dépenses et recettes s’ équilibrent sans faire de bénéfice ; il reste donc difficile de prévoir l’usure du matériel et son remplacement.

 

 

 

Analyse de livre parue dans la revue « Santé Publique »

imagesEn finir avec les idées fausses sur les pauvres et la pauvreté
Jean-Christophe Sarrot, Bruno Tardieu, Marie-France Zimmer, Préface Dominique Baudis
Ivry-sur-Seine (France) : Coédition Éditions de l’Atelier, Collection Social ECO HC ; 2014. 220 p
Alors que les inégalités sociales de santé constituent une priorité de santé publique, il est bon de lire, relire et faire lire ce petit livre (220 pages, quand-même, mais en format In-12), seconde édition, enrichie, d’un opuscule paru en 2013, et préfacé par Dominique Baudis, alors Défenseur des droits. Les 33 000 exemplaires de ce premier tirage ont été diffusés en moins d’un an. En 2014, pour un prix de 5 €, permis grâce à la solidarité inter-associative, ATD Quart Monde nous apporte 104 réponses argumentées, bibliographie à l’appui, à des assertions fréquemment entendues dans la population mais aussi de la part des professionnels.

Dans Politis, lors de la publication de la première édition, Ingrid Merckx citait brièvement quelques-unes des réponses :

« Oui, le système de protection sociale atténue les impacts de la pauvreté. Non, les gens qui vivent à la rue ne l’ont pas choisi. Si, les sans-abri veulent travailler : en 2001, 36 % étaient en recherche d’emploi. Non, la pauvreté ne peut pas arriver à tout le monde : elle résulte d’un cumul de difficultés (rupture familiale, licenciements, placements dans l’enfance). En revanche, la peur de se retrouver sans domicile est très répandue. Non, les pauvres ne font pas des enfants pour toucher les aides : malgré les aides, choisir d’avoir des enfants, c’est choisir de vivre avec moins d’argent par personne. Non, les pauvres ne profitent pas des aides : le taux de non-recours atteint 50 % pour le RSA, 29 % pour la CMU complémentaire, 62 % pour le tarif spécial solidarité d’EDF, 50 à 70 % pour les tarifs sociaux dans les transports urbains. Non, on ne gagne pas plus avec le revenu de solidarité active (RSA) qu’avec le salaire minimum interprofessionnel de croissance (Smic) : les familles qui galèrent avec le Smic galèrent encore plus avec le RSA. Oui, les pauvres peuvent posséder un téléphone portable et un écran plat : mais ce ne sont pas des indicateurs de richesse, contrairement au fait de posséder une voiture ou de manger de la
viande, par exemple. Non, les bénéficiaires de la couverture maladie universelle (CMU) n’en profitent pas pour faire des soins de confort : leur consommation de soins est légèrement supérieure à la moyenne mais leur état de santé moins bon. Si, les pauvres paient des impôts : ils échappent à l’impôt sur le revenu mais paient la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et les taxes sur les alcools et le tabac. »
Point n’est besoin d’argumenter plus avant. Dans son avant-propos, Marie-France Zimmer écrit « Les préjugés sur les pauvres sont trop répandus dans notre société. […] Pour  répondre à tout ce que l’on entend sur eux et sur nous, il est important de se référer à des
études et des chiffres officiels. Vous n’imaginez pas combien c’est vital pour nous ». Marie-France, membre de la Délégation nationale d’ATD Quart Monde France, sait ce que pauvreté veut dire et peut légitimement parler à la première personne. « Les pauvres sont les meilleurs experts de la pauvreté » disait Joseph Wresinski, fondateur d’ATD. Les écouter, les considérer dans leur richesse d’experts de ce qu’ils vivent, et dans leurs autres richesses, agir contre les préjugés, c’est lutter contre les inégalités sociales, et ce petit livre
peut y contribuer.
Jean-Pierre Deschamps

Analyse de livre  parue dans Santé Publique 2014/6 (Vol. 26)